Les femmes rurales sont toujours les plus touchées par des limitations, car les produits et services financiers tiennent le moins compte de leurs contraintes financières et culturelles.
Photo: © Josepha SengeYoungabi

Les freins à l’émergence financière des femmes au Cameroun

Au Cameroun, l'accès au financement dans les zones rurales reste un problème important. Les femmes représentent le maillon le plus touché. Comment cela peut-il s’expliquer ? Une étude a montré que les raisons se situent aussi bien du côté de l'offre que de la demande des produits et services financiers.

Au Cameroun, les banques et les établissements de microfinance (EMF) se concentrent principalement dans les zones urbaines et offrent très peu de services financiers adaptés aux besoins des exploitations agricoles et des entreprises agro-industrielles. Les femmes sont les plus touchées par ces limitations, car les produits et services financiers tiennent le moins compte de leurs contraintes financières et culturelles. Seules 10  pour cent des femmes camerounaises possèdent un compte dans une institution financière formelle, contre 18 pourcent des hommes*.

Par conséquent, les agricultrices sont moins en mesure d'épargner et de se préparer aux imprévus et autres crises. Afin de développer des idées et des activités solides pour améliorer l'accès des productrices et des entrepreneuses aux produits et services financiers, le projet global de la coopération internationale allemande « Promotion du Financement Agricole (ProFinA) » a mené une étude dont l’objectif était d’étudier les facteurs limitant l’accès des femmes rurales aux services financiers au Cameroun.

Des entretiens individuels ont été conduit avec les personnes ressources sélectionnées, au total 37 soit 16 femmes et 23 hommes. Les focus group discussions se sont déroulés avec les agricultrices et agriculteurs bénéficiant des appuis du ProFinA, mais aussi avec les femmes non bénéficiaires des services financiers promus par ProFinA. Au total, 11 focus-groups menés ont permis de toucher 110 personnes dont 65 femmes et 45 hommes.

La collecte des données s’est déroulée en automne 2022 dans les régions du Centre, de l’Ouest et de l’Adamaoua. L'analyse des données recueillies a révélé que l'accès limité des femmes aux services financiers s'explique tant du côté de l'offre (EMF et banques) que de celui de la demande (agricultrices et entrepreneuses).

Des formalités lourdes et rigides des banques financières  limitent l’accès des femmes
 

Du côté de l’offre des produits et services financiers par les EMF et banques, l’étude a relevé que leur accès requiert des formalités lourdes et rigides, ce qui limite l’accès des femmes, surtout des femmes rurales. L’ouverture de compte est souvent obligatoire avant toute offre de services financiers et les conditions sont peu favorables pour la femme en général et celle rurale en particulier. L’exigence d’une garantie de bien matériel dans un contexte social où la femme a un accès limité sur le contrôle des ressources foncières du ménage crée une discrimination du côté de l’offre de crédit.

Les femmes ont de la peine à déposer des garanties auprès des EMF. Aussi, une partie du montant demandé (garantie financière) ainsi qu’une preuve de leurs activités génératrices de revenus ne sont pas aisées à obtenir par les femmes débutantes.

D’autres facteurs limitant l’accès du côté de l’offre, sont la faible couverture géographique des produits et services financiers dans le milieu rural et l’insuffisance d’une communication et d’un marketing efficace sur leurs services, surtout d’un marketing sensible aux femmes.

Sur le côté de la demande, le faible niveau de scolarisation et d’alphabétisation des femmes s’est fait remarquer. Ceci est surtout lié à la sous-scolarisation des filles dans certaines régions, surtout dans la région de l’Adamaoua. Elles sont moins exposées aux informations sur la disponibilité des services financiers et leurs conditions d’accès. La non-détention des documents indispensables à l’état civil pose un autre problème d’accès pour les femmes rurales. La faible capacité des femmes en éducation financière et le manque d’éducation digitale face à une augmentation de la digitalisation, les rendent peu sensible aux risques et aux opportunités en matière financière.

A ces facteurs s'ajoute la peur des femmes de prendre des risques. Ce manque de confiance est la conséquence d’un manque de culture financière.

L’analyse a conclu que la plupart des produits et services financiers développés par les prestataires des services financiers sont standard, non sensibles au genre. En matière d'accès aux services financiers, la faible connaissance des femmes en entrepreneuriat, en technologie de l’information et en gestion financière constitue un frein. Elle est renforcée par un environnement socio-culturel à caractère patriarcal défavorisant les femmes en accès à la terre, aux biens et à l’héritage.

* Ministère de la Promotion de la Femme et de la Famille/UN Women (2020) : Cameroun. Profil Genre-Pays. Profil-Genre-Final-Final-BON.pdf (ins-cameroun.cm)

Auteurs : Christian Eloundou & Corinna Schüller, Conseillers Techniques à Deutsche Gesellschaft für Internationale Zusammenarbeit (GIZ) GmbH, Yaoundé, Cameroun

 


 


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