Selon une récente étude, les incitations économiques qui encouragent l’investissement dans les énergies renouvelables devraient toujours comporter un volet social.
Photo: © Shutterstock/ Alberto Masnovo

Un indice de justice énergétique met un coup de projecteur sur la transition énergétique

Pour éviter les dangers associés au changement climatique et répondre aux besoins énergétiques mondiaux, les systèmes énergétiques doivent changer. Dans les pays du Sud global, les espoirs de voir la transition vers une économie à faibles émissions de CO2 stimuler le développement durable sont particulièrement élevés.

Dans le Sud global, le passage à une économie zéro carbone peut-il être le moteur d’un développement durable ? Une équipe dirigée par des chercheurs de l’Institut de recherche sur la durabilité (RIFS), à Potsdam, Allemagne, a élaboré la première méthode quantitative permettant de déterminer dans quelle mesure, dans le Sud global, les transitions énergétiques intègrent des éléments de justice énergétique. 

Préparée par l’auteure principale Maria Aspergi et une équipe de chercheurs, l’étude intitulée An energy justice index for the energy transition in the Global South, (un indice de justice énergétique au service de la transition énergétique dans le Sud global) permet d’effectuer une comparaison quantitative normalisée des processus de transition de différents pays. Une évaluation quantitative de la mesure dans laquelle les transitions énergétiques des pays du Sud global respectent l’impératif de justice énergétique faisait défaut jusqu’à maintenant. L’indice présenté en mars 2024 dans la revue Renewable and Sustainable Energy Reviews comble ce déficit.

Le concept de justice énergétique
 

La justice énergétique est un concept qui aborde la question de l’équité des systèmes énergétiques en tenant compte de l’incidence des technologies, politiques et projets énergétiques sur la société et le développement. Une part importante des études consacrées à la justice énergétique et publiées à ce jour mettait l’accent sur l’évaluation des implications que peuvent avoir les transitions vers une économie à faible production de carbone et les énergies renouvelables sur la justice. L’indice récemment élaboré offre un cadre analytique d’identification des injustices des processus énergétiques et de proposition de solutions. Il a été obtenu en affectant divers éléments de justice énergétique aux trois principes essentiels de justice procédurale, justice de reconnaissance et justice distributive.

Étude axée sur quatre pays
 

L’étude est basée sur les évaluations empiriques de quatre études de cas pour les années 2010–2019 dans les pays suivants : Kenya, Jordanie, Chili et Malaisie. Ces pays ont été choisis de manière à disposer d’un échantillon représentatif de régions du monde pouvant être associées au Sud global. Par ailleurs, ces quatre pays ont, dans une certaine mesure, été des pionniers de la transition énergétique dans leurs régions respectives. 

L’étude met en lumière d’une part la disponibilité limitée de données secondaires pour évaluer certains éléments de la justice énergétique et d’autre part la difficulté de trouver des informations sur les processus appliqués dans l’élaboration de projets d’énergies renouvelables, notamment dans le cas de la Malaisie. Selon les auteurs, cela souligne la nécessité d’améliorer la disponibilité de données pertinentes.

Des injustices dans tous les pays
 

À en croire les auteurs, les résultats révèlent la présence de problèmes de justice distributive, procédurale et de reconnaissance dans le processus de transition énergétique des quatre pays faisant l’objet de l’étude de cas. Les résultats de l’indice montrent également une variation notable des résultats des pays pour les différents principes et éléments de la justice énergétique.

Les auteurs soulignent que le classement des pays concernés ne correspond pas toujours à leur niveau de développement économique. La Malaisie et le Chili, par exemple, ont obtenu leurs meilleurs résultats dans le domaine de la justice distributive, alors que ceux du Kenya et de la Jordanie l’ont été dans le domaine de la justice procédurale. Le Kenya a également obtenu ses meilleurs résultats dans le domaine de la justice intergénérationnelle et de la répartition des coûts et bénéfices de l’infrastructure des énergies renouvelables.

Implications pour la politique climatique
 

Les chercheurs conseillent aux gouvernements nationaux et aux acteurs transnationaux tels que les institutions multilatérales et les investisseurs de collaborer à la mise en place de cadres et de stratégies politiques intégrant systématiquement des questions de justice. Cela concerne les règlements visant la procédure officielle de conception des systèmes énergétiques ainsi que la prise en compte des questions d’accès, d’abordabilité et de distribution.

Les auteurs font remarquer que des politiques en faveur de la justice de reconnaissance grâce à des programmes d’électrification rurale et de microfinancement, par exemple, sont également indispensables pour la protection des groupes vulnérables. Les instruments économiques qui encouragent l’investissement dans les énergies renouvelables doivent également tenir compte de critères sociaux. Par ailleurs, les responsables des orientations politiques pourraient tirer avantage de l’adoption de procédures de contrôle, de déclaration et de vérification des données pour les indicateurs liés à la justice énergétique, de manière à améliorer la qualité et la disponibilité des données.

L’indice présenté dans l’étude contribuera aux discussions sur la justice énergétique et facilitera l’évaluation de cette dernière dans le temps et entre les pays. Les résultats illustrent la pluridimensionnalité et la complexité du concept de justice énergétique, notamment lorsqu’on l’applique à la transition énergétique. S’appuyant sur une multitude de données et accessible en ligne, l’indice peut devenir un précieux outil pour les chercheurs et les décideurs qui s’efforcent d’étudier la justice énergétique de manière systématique et de l’améliorer – dans le Sud global et au-delà.

(RIFS/wi)

Référence : Maria Apergi, Laima Eicke, Andreas Goldthau, Mustafa Hashem, Sebastian Huneeus, Renato Lima de Oliveira, Maureen Otieno, Esther Schuch, Konstantin Veit: An energy justice index for the energy transition in the global South, Renewable and Sustainable Energy Reviews 192 (2024) 114238. 

 

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