La plupart des espèces de plantes à fleurs ont besoin de pollinisateurs pour se reproduire. Espèces de marguerites annuelles qui, au printemps, fleurissent un peu partout en Afrique du Sud.
Photo: ©Shutterstock

La réduction du nombre de pollinisateurs menace la biodiversité

On sait que le nombre de pollinisateurs diminue dans de nombreuses régions de la planète, mais on ne sait pas très bien dans quelle mesure c’est important pour les populations végétales car les plantes peuvent souvent produire des graines sans pollinisateurs.

Environ 175 000 espèces végétales – la moitié de toutes les plantes à fleurs – dépendent essentiellement ou totalement d’animaux pollinisateurs pour produire des graines et, par conséquent, se reproduire. La diminution du nombre de pollinisateurs pourrait par conséquent entraîner des perturbations majeures des écosystèmes naturels, y compris une perte de biodiversité. Tel est le constat d’une étude intitulée Widespread vulnerability of plant seed production to pollinator declines et publiée dans la revue Science Advances le 13 octobre 2021.

Le Dr James Rodger, stagiaire postdoctoral au département des sciences mathématiques de l’université de Stellenbosch (Afrique du Sud) et auteur principal, déclare qu’il s’agit-là de la première étude donnant une estimation mondiale de l’importance des pollinisateurs pour les plantes des écosystèmes naturels. 

Cette étude, à laquelle ont participé 21 chercheurs affiliés à 23 institutions de cinq continents, a été dirigée par le Dr James Rodger et le professeur Allan Ellis, de l’université de Stellenbosch (Afrique du Sud). C’est un produit du Centre de synthèse des sciences de la biodiversité (Synthesis Centre for Biodiversity Sciences – sDiv) du Centre allemand de recherche intégrative sur la biodiversité (German Centre for Integrative Biodiversity Research – iDiv) à Halle-Wittenberg.

Selon la professeure Tiffany Knight, co-autrice sénior, de récentes évaluations effectuées à l’échelle mondiale sur la pollinisation ont mis en évidence un déficit de connaissances et de compréhension de la considérable interdépendance des plantes et des pollinisateurs. « Notre étude synthétique cherche à combler ce déficit et nous permet d’établir un lien entre les tendances constatées en ce qui concerne, d’une part, la biodiversité et l’abondance des pollinisateurs et, d’autre part, les conséquences pour les plantes au niveau mondial, » fait remarquer Tiffany Knight, qui dirige le groupe de recherche Spatial Interaction Ecology à l’université Martin Luther de Halle-Wittenberg (MLU), le Centre Helmholtz pour la recherche environnementale (UFZ) et iDiv.

La plupart des plantes sont pollinisées par des animaux, mais elles sont aussi, généralement, et dans une faible mesure, auto-fertiles. Cela veut dire qu’elles peuvent produire ne serait-ce que quelques graines, sans pollinisateurs, par exemple par auto-fertilisation. Toutefois, jusqu’à cette étude, on n’avait pas de réponse claire, au niveau mondial, à la question de savoir à quel point les pollinisateurs sont importants pour les plantes sauvages.  

Les chercheurs se sont appuyés sur la contribution des pollinisateurs à la production de graines – mesure obtenue par comparaison de la production de graines en l’absence de pollinisateurs avec la production de graines en présence de pollinisateurs – comme indicateur de leur importance pour les plantes. On disposait déjà de données à ce sujet, mais elles étaient éparpillées dans des centaines de documents mettant chacun l’accent sur des expériences de pollinisation effectuées sur différentes espèces de plantes.

Pour s’attaquer à ce problème, des chercheurs de diverses institutions ont commencé à rassembler les informations dans des bases de données. Le docteur James Rodger a créé la Stellenbosch Breeding System Database ; les professeures Tiffany Knight et Prof Tia-Lynn Ashman ainsi que la docteure Janette Steets ont dirigé le groupe de travail sPLAT qui a produit la base de données GloPL ; et le professeur Mark van Kleunen et la docteure Mialy Razanajatovoof, de l’université de  Constance/Allemagne, ont produit la Konstanz Breeding System Database. Ces trois bases de données ont été réunies en une nouvelle base de données aux fins de l’étude en cours. Cette nouvelle base de données contient des informations fournies par 1 528 expériences séparées, représentant 1 392 populations de plantes et 1 174 espèces provenant de 143 familles de plantes et de tous les continents à l’exception de l’Antarctique.  

Les résultats montrent que sans pollinisateurs, un tiers des espèces de plantes à fleurs ne produiraient pas de graines et que pour une moitié, la réduction de la fertilité serait de 80 pour cent ou plus. Par conséquent, même si l’auto-fertilité est courante, elle ne compense aucunement les réductions des services de pollinisation dans la plupart des espèces végétales.

« Nos conclusions, selon lesquelles de grands nombres d’espèces végétales sauvages ont besoin de pollinisateurs, montre que la diminution du nombre de ces derniers pourrait entraîner des perturbations majeures dans les écosystèmes naturels, » prévient James Rodger.

Les pollinisateurs sont importants pour la production agricole, mais ils le sont aussi pour la biodiversité 


Selon le professeur van Kleunen, également co-auteur de l’étude, ce n’est pas une question de disparition de tous les pollinisateurs : « S’il y a moins de pollinisateurs autour de nous, ou ne serait-ce qu’un changement dans les espèces de pollinisateurs les plus nombreuses, on peut s’attendre à ce que cela ait des répercussions sur les plantes et à ce que le nombre des espèces végétales touchées recule, ce qui, selon les plantes concernées, aurait des conséquences néfastes pour les espèces animales et les populations humaines. Les pollinisateurs ne sont pas importants que pour la production agricole ; ils le sont également pour la biodiversité, » déclare-t-il. « Cela veut également dire que les plantes qui n’ont pas besoin de pollinisateurs, comme c’est le cas de nombreuses mauvaises herbes, peuvent proliférer encore plus lorsque le nombre de pollinisateurs continue de diminuer. » 

Selon James Rodger, la situation n’est pas catastrophique pour autant. De nombreuses plantes ont une grande longévité, ce qui laisse la possibilité de rétablir les pollinisateurs avant que des espèces végétales disparaissent totalement, faute, précisément, de pollinisateurs. « Nous manquons de données qualitatives de suivi à long terme des pollinisateurs en Afrique, par exemple, y compris en Afrique du Sud, même si des travaux allant dans ce sens ont été entrepris, » conclut le docteur Rodger.

(Université de Stellenbosch/iDiv/wi)

Publication initiale :
Rodger, J. G., Bennett, J. M., Razanjatovo, M., Knight, T. M., Ellis, A. G. et al. (2021) Widespread vulnerability of plant seed production to pollinator declines. Science Advances, Vol. 7, No. 42. DOI: 10.1126/sciadv.abd3524

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