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L’agroécologie pour une protection des cultures sans pesticides
De nombreux scientifiques s’intéressent et développent des approches de protection des cultures permettant de réduire, voire supprimer totalement l’usage des pesticides dans certaines conditions. Parmi elles : la protection agroécologique des cultures. « Il s’agit de l’application des principes de l’agroécologie à la protection des cultures », précise Jean-Philippe Deguine, agroécologue au Cirad, un institut francais de la recherche à Montpellier, qui a coordonné l’article Agroecological crop protection for sustainable agriculture.
Elle s’appuie sur deux principes fondateurs de l’agroécologie, à savoir la valorisation de la biodiversité et le renforcement de la santé des sols, ainsi que sur le principe originel de la protection des cultures qui privilégie les mesures préventives (variétés tolérantes/résistantes aux maladies, pratiques agricoles adaptées, combinaison de solutions agronomiques à effet partiel) aux mesures curatives (usage de pesticides) contre les bioagresseurs des cultures.
« Contrairement à un pesticide qui est homologué et doit être utilisé pour un type bien précis de bioagresseurs, la protection agroécologique des cultures va permettre d’agir à l’échelle du territoire ou de l’agroécosystème et sur tous les bioagresseurs, en entrant dans un cercle vertueux de valorisation de la biodiversité pour renforcer la santé de l’agrosystème », poursuit le chercheur.
Un lien positif fort entre diversité végétale et régulation naturelle des bioagresseurs (insectes ravageurs, plantes adventices, champignons pathogènes) est en effet démontré dans une récente expertise pilotée par l’INRAE, l’institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement, à laquelle le Cirad a participé.
Pour les scientifiques co-auteurs de ce document de référence, la protection agroécologique des cultures est capable à la fois de : maintenir ou améliorer la productivité agricole (en réduisant les dommages causés par les bioagresseurs), produire des aliments sains, réduire les impacts négatifs de l'agriculture sur l'environnement et la santé humaine (pas d’usage de pesticides) et contribuer à améliorer la viabilité économique des exploitations agricoles. Les auteurs font une synthèse des connaissances acquises et proposent des chemins d’action vers une généralisation de la protection agroécologique des cultures.
« Le concept peut être appliqué partout dans le monde, à condition de tenir compte des spécificités locales, précise Nadine Andrieu, agronome au Cirad et co-autrice du document. À ce titre, le partage des connaissances, à double sens entre scientifiques et agriculteurs, est primordial, mais il faudra aussi un appui conséquent des politiques publiques pour accompagner les nécessaires transformations techniques et organisationnelles. »
Prendre en compte la durée nécessaire pour la mise en œuvre de la protection agroécologique des cultures
Les politiques publiques devront aussi prendre en compte la durée nécessaire pour la mise en œuvre de la protection agroécologique des cultures dans les systèmes agricoles, qui nécessite une phase de transition pouvant s’étaler sur plusieurs années, entre le diagnostic partagé de terrain, la reconception participative des systèmes de culture, la formation des agriculteurs, la coordination entre les acteurs.
« Mais il faut sortir de la logique actuelle du court-terme et prendre le temps de recréer des équilibres biologiques dans les agroécosystèmes. Plus tôt on commence, plus tôt ces nouveaux systèmes pourront répondre aux enjeux actuels de l’agriculture », souligne Eric Scopel, agronome au Cirad.
Signé par 56 scientifiques, l’article de référence compile environ 300 références bibliographiques sur la protection agroécologique des cultures, issues de tous les continents et ouvre des perspectives en termes de potentialités mais aussi de nouvelles recherches à mener.
(CIRAD/wi)
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