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Développement de variétés de riz résistantes à une épidémie bactérienne en Afrique
La bactériose vasculaire du riz, causée par la bactérie Xanthomonas oryzae pathovar oryzae (Xoo), est responsable chaque année d’énormes pertes de récoltes pour les riziculteurs. Elle met en péril les moyens de subsistance des petits agriculteurs d'Asie et d'Afrique et est responsable de malnutrition et de famine dans les régions touchées.
Bien que la bactériose n'ait pas été considérée comme une menace majeure pour la production de riz en Tanzanie jusqu'à présent, en 2019, des champs présentant de graves dommages causés par la maladie ont été détectés dans la région de Morogoro, dans l'est de la Tanzanie. Des recherches ultérieures ont en outre révélé que l'agent pathogène s'était déjà répandu dans de nombreuses régions de Tanzanie. Compte tenu de la rapidité de la propagation, il y a lieu de craindre que la maladie migre également vers les pays voisins.
Le génome de la bactérie est distinct de celui des populations africaines mais similaire à celui des souches asiatiques
Afin de déterminer l'arsenal utilisé par cette souche, les chercheurs ont séquencé le génome du phytopathogène. L'analyse des séquences a permis de constater que la bactérie est distincte des populations indigènes d'Afrique, mais qu’elle est très similaire aux souches d'Asie et qu’elle possède un outil qui bloque un gène commun de résistance du riz, appelé iTAL, ainsi qu’un ensemble particulier de clés donnant accès au garde-manger de la plante.
L'injection d'une protéine « clé » régulatrice, développée par ces bactéries, dans les cellules de riz déclenche la production d'un transporteur de sucre appelé SWEET11a, qui conduit à la libération de sucre dans le voisinage des bactéries, peut servir à la nutrition et est nécessaire à la multiplication et à la virulence de la bactérie.
Selon le Dr Boris Szurek, qui dirige le groupe d'étude à l'Institut national de recherche pour le développement durable (IRD), des souches asiatiques n'ont jamais été retrouvées en Afrique avant 2019. De même, les souches africaines n'ont pas été trouvées en Asie, ce qui permet de conclure à une migration récente d'Asie en Afrique, laquelle provoque actuellement des pertes de rendement dans toute la Tanzanie.
Le professeur Wolf B. Frommer, de l'Institut de physiologie moléculaire de l'Université Heinrich Heine de Düsseldorf en Allemagne , qui dirige le consortium international de recherche « Healthy Crops », explique : « Pour protéger la production africaine de riz de la menace émergente que représente ce phytopathogène, nous avons utilisé de nouvelles techniques de sélection pour changer les serrures de la variété élite populaire d'Afrique de l'Est « Komboka », de sorte que la clé du pathogène ne puisse plus ouvrir le garde-manger et donc ne pas provoquer la maladie. Les lignées modifiées présentent une résistance à large spectre contre toutes les souches asiatiques et africaines connues de Xoo, y compris les souches récemment découvertes en Tanzanie ».
Contexte : Le projet « Healthy Crops »
Les pesticides sont souvent utilisés pour lutter contre la bactérie Xoo, mais leur efficacité est limitée et ils exposent la population à des risques. Le projet de recherche international à but non lucratif « Healthy Crops » adopte une approche différente, dans le but de sélectionner et de mettre à disposition des lignées de riz résistantes à la maladie. Cela devrait permettre d'augmenter considérablement les rendements des cultures des petits producteurs du secteur alimentaire en Afrique et en Asie.
Le projet est un consortium international auquel participent des scientifiques de l’université Heinrich Heine de Düsseldorf, de l'université de Floride et de l'université du Missouri aux États-Unis, du Centre international d'agriculture tropicale en Colombie (CIAT), de l'Institut français de recherche pour le développement durable (IRD), de l'Institut international de recherche sur le riz (IRRI) aux Philippines et au Kenya, ainsi que de deux instituts du Conseil indien de la recherche agricole (ICAR).
Pour atteindre ses objectifs, le consortium a développé une stratégie de lutte contre la bactériose. L'équipe a déjà réussi à sélectionner des lignées de riz résistantes à la maladie. Une boîte à outils de diagnostic a également été développée pour permettre un diagnostic rapide des souches bactériennes pathogènes émergentes.
(HHU/wi)
Plus d’informations (en anglais) :
Le projet « Healthy Crops »
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