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Une rémunération mensuelle pour favoriser l’épargne
Selon des chercheurs de l’université de Zurich, Suisse, les rémunérations mensuelles favoriseraient considérablement le développement économique. Publiée en février 2019, leur étude montre que les producteurs de lait et les ouvriers agricoles préfèrent être payés en une seule fois, à la fin du mois, plutôt que quotidiennement, car la mensualisation des salaires est un outil efficace de stimulation de l’épargne.
Dans la partie centrale du Kenya, les producteurs laitiers possèdent généralement deux ou trois vaches et vendent leur lait sur une base quotidienne. Ils ont besoin de cet argent pour leur consommation quotidienne mais doivent également en mettre de côté en prévision de dépenses plus importantes, par exemple l’achat d’aliments pour les vaches ou les frais de scolarité. Des études antérieures montrent que les gens ont du mal à épargner ou à couvrir des dépenses ponctuelles inattendues lorsqu’ils perçoivent un faible salaire quotidien.
Les agriculteurs sont pour des salaires mensuels, même moins élevés
Lorsque les producteurs laitiers du Kenya ont à choisir entre percevoir un paiement mensuel ou un paiement quotidien pour la vente de leur lait, 86 pour cent choisissent d’être payés à la fin du mois, même s’ils doivent pour cela consentir une réduction de 15 pour cent sur la vente du litre de lait. Interrogés sur la raison de leur choix, les agriculteurs, dans leur majorité, ont indiqué qu’ils s’étaient fixé des objectifs d’épargne et ne se faisaient pas confiance pour ce qui est de gérer leur argent pendant la durée du mois.
Lorsqu’on leur a donné le choix de revenir aux paiements quotidiens à tout moment du mois ou de s’engager à être payés sur une base mensuelle, 93 pour cent n’ont pas choisi la solution la plus souple. Les chercheurs en ont conclu que les questions de maîtrise de soi sont le facteur principal de la demande de paiements mensuels.
Les petits acheteurs de lait ne peuvent pas suivre
Malgré la forte demande de paiements mensuels, les acheteurs ne peuvent pas suivre. Dans la région où s’est déroulée l’étude, un seul acheteur important de lait offrait la possibilité d’effectuer des paiements mensuels. Les chercheurs font remarquer que les petits clients n’ont pas la crédibilité voulue pour offrir un tel plan de paiement : les producteurs de lait craignent de voir les petits clients s’enfuir avec l’argent qui leur est dû à la fin du mois.
« La confiance est cruciale pour le développement économique. Avec une tierce partie crédible ou des organisations judiciaires garantissant les paiements, les producteurs seraient prêts à vendre à de petites laiteries et la concurrence entre ces dernières serait plus importante. Par conséquent, l’exécution plus stricte des contrats contribue à établir le marché, » déclare Lorenzo Casaburi, professeur adjoint dans le département d’économie de l’université UZH, également co-auteur du document.
L’étude montre que les gens sont prêts à payer le prix fort pour des mesures engageant à lutter contre les problèmes de maîtrise de soi. Selon les auteurs, le mécanisme proposé dans le document s’applique également aux producteurs et ouvriers d’autres pays.
« Les conclusions concernant le fait que les paiements peu fréquents constituent des outils d’épargne peuvent également être pertinentes pour les pays développés. Par exemple, de nombreux pays, dont la Suisse, ont adopté la formule du treizième salaire pour faire en sorte que les travailleurs disposent de plus de liquidité pour couvrir leurs dépenses de fin d’année, » explique Lorenzo Casaburi.
(UZH/ile)
Plus d’informations (en anglais) :
Lorenzo Casaburi, Rocco Macchiavello. Demand and Supply of Infrequent Payments as a Commitment Device: Evidence from Kenya. American Economic Review. Février 2019. DOI: 10.1257/aer.20180281
https://www.aeaweb.org/articles?id=10.1257/aer.20180281
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