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Indice de la faim dans le monde 2019 : le changement climatique exacerbe la faim
Si les progrès réalisés dans la réduction de la malnutrition se poursuivent au rythme actuel, environ 45 pays ne réussiront pas à atteindre l’Objectif de développement durable 2 « Faim zéro » (ou du moins un faible niveau de faim) d’ici à 2030. C’est-là un des résultats présentés par l’Indice de la faim dans le monde (IFM) de cette année, publié annuellement par les ONG Welthungerhilfe et Concern Worldwide à l’occasion de la Journée mondiale de l’alimentation, le 16 octobre.
L’Indice de la faim dans le monde 2019 analyse la situation nutritionnelle de 117 pays. Résultat : 822 millions de personnes souffrent de la faim dans le monde. Après des années de recul, ce nombre a recommencé à progresser au cours des trois dernières années (il était de 785 millions en 2015). Par ailleurs, environ deux milliards de personnes souffrent de malnutrition. D’un côté, l’IFM a reculé de 31% depuis 2000, et 14 pays ont considérablement amélioré leur situation pendant cette période, parmi lesquels l’Angola, l’Éthiopie, le Laos et le Rwanda. De l’autre, la situation de neuf pays (dont la République centre-africaine, le Liban, le Yémen et le Venezuela) a empiré par rapport à ce qu’elle était en 2000.
Les progrès sont en recul
« Les progrès réalisés en matière de réduction de la faim ne sont pas suffisants, » a constaté Klaus von Grebmer, conseiller stratégique de l’Institut international de recherche sur les politiques alimentaires (IFPRI), lors de la présentation de l’IFM à la mi-octobre, à Berlin. En plus de la mauvaise gouvernance, des conflits et des crises, il a cité le changement climatique comme une des raisons essentielles de cette situation. Le rapport montre que depuis le début des années 1990, le nombre de phénomènes météorologiques extrêmes (sécheresses, tempêtes, inondations et incendies) a doublé. Or, ces phénomènes ont un impact direct sur la vie et les moyens d’existence de la population de l’hémisphère sud.
Ils entraînent la destruction des récoltes, mais aussi la perte de bétail due à la sécheresse ou à la détérioration de la valeur nutritionnelle des végétaux en raison de conditions défavorables. Le riz, par exemple, qui est la denrée alimentaire de base de la moitié de la population mondiale, est extrêmement sensible aux variations de la température ou de la teneur du sol en sel. Le rapport prévient que dans des zones de culture clés telles que le delta du Mékong, les conséquences du changement climatique pourraient rapidement avoir un effet néfaste sur la situation nutritionnelle d’importants secteurs de la population. « Le changement climatique fait reculer les progrès réalisés à l’échelle mondiale ces dernières années, » constate Marlehn Thieme, présidente de Welthungerhilfe. « Nos études montrent clairement que les pays dont l’IFM est élevé sont plus vulnérables aux effets du changement climatique. Ce sont aussi les moins aptes à prendre des mesures pour lutter contre eux. »
Expérience au Niger
À titre d’exemple, citons le Niger. Ce pays d’Afrique de l’Ouest s’est classé dernier des 189 pays pris en compte par l’Indice de développement humain, 101ème des 117 pays pris en compte par l’IFM, et sa situation en matière de faim est considérée comme « sérieuse », avec un indice de 30,2. « Il y a 20 ans, cette situation était encore ‘alarmante’, » fait remarquer Francis Djomeda, directeur pays de Welthungerhilfe au Niger. Toutefois, cette réussite irrégulière est également menacée dans son pays. Aujourd’hui, la saison des pluies commence plus tard qu’avant et dure 2,5 mois au lieu de quatre, et la période de soudure est passée de trois à six mois. Les récoltes ne sont plus suffisantes pour combler ce manque. En conséquence, les familles ne mangent qu’une fois par jour, au lieu de trois. Elles sont souvent forcées de manger les semences prévues pour la prochaine saison.
Parallèlement, on constate une augmentation du nombre d’inondations. Ces phénomènes ne se traduisent pas seulement par la perte d’habitations, de champs et d’animaux ; ils multiplient le nombre des épidémies et des maladies chez les animaux, par exemple le paludisme et le choléra. Nombreux sont ceux qui renoncent à l’agriculture ou émigrent. Le conflit actuel entre agriculteurs et populations nomades dans leur lutte pour de maigres ressources est exacerbé par la migration interne, sans parler des vastes flux de réfugiés venant des pays voisins (Burkina Faso, Mali, Nigeria et Tchad) pour fuir de violents conflits. De plus en plus de personnes doivent partager des ressources de plus en plus rares.
Un soutien accru pour les PMA
Pour améliorer la résilience des populations touchées, des modifications sont nécessaires (par exemple l’utilisation de semences résistant à la sécheresse et la protection des lits des cours d’eau et des systèmes d’irrigations), ainsi que la mise en place de systèmes d’alerte précoce. Toutefois, selon la présidente de Welfhungerhilfe, les mesures actuellement prises au niveau mondial sont totalement insuffisantes. Elle a instamment demandé à la communauté internationale des nations de donner la priorité au financement des mesures d’adaptation au changement climatique et d’atténuation de ce phénomène dans les pays les moins avancés (PMA). Ce financement devrait venir en sus de l’Aide officielle au développement.
Silvia Richter, rédactrice, Rural 21
Plus d’informations :
Site web de l’Indice de la faim dans le monde (en anglais)
Le rapport de l’Indice de la faim dans le monde est disponible en anglais, en français (synthèse), en allemand, en italien et en espagnol.
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