Les rizières représentent cinq pour cent des émissions mondiales de méthane, un gaz à effet de serre 25 fois plus puissant que le CO2.
Photo: Shutterstock, Borna Mirahmadian

Réduire les émissions de méthane dans les rizières grâce aux bactéries « câbles »

La riziculture mondiale a un impact négatif sur le climat, car les rizières émettent de grandes quantités de méthane. La collaboration de chercheurs danois et allemands a peut-être trouvé une solution à l’impact considérable de la production mondiale de riz sur le changement climatique. En ajoutant des bactéries « câbles » conductrices d’électricité dans le sol renfermant les plants de riz, ils pourraient réduire les émissions de méthane de plus de 90 pour cent.

La moitié de la population mondiale se nourrit de riz, mais la culture de cette céréale a un effet néfaste sur le climat. Les rizières représentent cinq pour cent des émissions mondiales de méthane, un gaz à effet de serre 25 fois plus puissant que le dioxyde de carbone.

Cela tient au fait que le riz pousse dans l’eau et que, lorsque les champs sont inondés, le sol s’appauvrit en oxygène, ce qui favorise la production de méthane par les micro-organismes.  

Des chercheurs de l’université de Aarhus, au Danemark, et de l’université de Duisburg-Essen, en Allemagne, ont découvert que les bactéries « câbles » pourraient bien constituer une part importante de la solution. En laboratoire, ils ont cultivé du riz dans un sol avec et sans bactéries « câbles » et ont observé ce qui se passait.

« La différence a de loin dépassé leurs attentes. Dans les pots contenant des bactéries « câbles », les émissions de méthane ont été 93 pour cent inférieures à celles des pots n’en contenant pas, » a déclaré Vincent Valentin Scholz, qui a réalisé les expériences en tant que doctorant au centre d’électromicrobiologie de l’université de Aarhus. Les résultats de l’étude ont été publiés le 20 avril 2020 dans la revue scientifique Nature Communications.

Les bactéries « câbles » – découvertes pour la première fois dans la baie de Aarhus, au Danemark 


Ces organismes vivants étaient inconnus jusqu’à ce qu’on les identifie pour la première fois dans la baie de Aarhus, en 2012. Ils se développent au fond des mers, des lacs, des nappes phréatiques et des cours d’eau, et souvent en grandes quantités. Chacun d’eux comprend des milliers de cellules dans une chaîne longue d’un centimètre enveloppée d’une gaine extérieure commune pourvue de filaments électriques. Une extrémité de cet organisme est enterrée dans le sédiment pauvre en oxygène alors que l’autre est si proche de l’eau qu’elle est contact avec l’oxygène. Cela lui permet d’utiliser l’énergie électrique pour brûler sa nourriture dans un environnement exempt d’oxygène. Le processus modifie également la composition chimique du sol. 

« Les bactéries « câbles » transportent les électrons sur des distances de l’ordre du centimètre le long de leurs filaments, modifiant ainsi l’état géochimique du sol saturé d’eau. Elles recyclent les composés sulfurés du sol et maintiennent ainsi une grande quantité de sulfate dans le sol. En conséquence, les microbes producteurs de méthane ne peuvent maintenir leur activité, » explique Vincent Valentin Scholz.

On sait déjà que les riziculteurs peuvent temporairement ralentir l’émission de méthane en répandant du sulfate dans les rizières. Apparemment, les bactéries « câbles » peuvent faire ça à leur place, et pas seulement de manière temporaire.

Les résultats de l’étude permettent d’avoir un nouveau regard sur le rôle des bactéries « câbles » en tant qu’ingénieurs écosystémiques. Les auteurs insistent sur le fait qu’ils ne disposent que des toutes premières observations de laboratoire, mais il est tentant d’imaginer que l’enrichissement en bactéries « câbles » grâce à une gestion raisonnée du régime hydrique et du sol pourrait devenir une solution durable et pratique de réduction des émissions de méthane dans les rizières. Il faut maintenant procéder à des études sur le terrain pour voir comment les bactéries « câbles » peuvent de développer dans les rizières. 

(Universités de Aarhus et de Duisburg-Essen/wi)

Publication originale :
Scholz, V., Meckenstock, R.U., Nielsen, L.P. et al. Cable bacteria reduce methane emissions from rice-vegetated soils. Nat Commun 11, 1878 (2020).

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