Une bonne saison des pluies dans un village du sud-ouest du Burkina Faso.
Photo: Shutterstock/MattL_Images

En Afrique de l’Ouest, l’approvisionnement alimentaire doit être planifié en fonction des risques

Les conditions météorologiques extrêmes font obstacle à la réalisation de l’objectif de développement durable « faim zèro » (ODD 2), dans le monde et plus particulièrement en Afrique de l’Ouest où ce problème est aggravé par la rapidité de la croissance démographique. Dans une récente étude, des chercheurs ont élaboré un modèle montrant comment, en Afrique de l’Ouest, il est possible d’améliorer la fiabilité de l’approvisionnement alimentaire à peu de frais en tenant compte des phénomènes responsables des faibles rendements.

Un système de production alimentaire stable et fiable est une condition indispensable à la sécurité alimentaire. Cependant, dans de nombreuses régions du monde, la production alimentaire est gravement menacée par la variabilité des récoltes annuelles, variabilité due à des conditions météorologiques extrêmes telles que les périodes de sécheresse et les inondations. En raison du changement climatique, ces phénomènes météorologiques sont plus graves et plus fréquents. En Afrique de l’Ouest, où la croissance démographique est rapide et où les conflits sont courants, le retard pris dans la réalisation de l’ODD 2 (« faim zéro ») est particulièrement évident.

Dans leur récente étude publiée en février dans la revue Communications Earth & Environment, des chercheurs de l’Institut international d’analyse des systèmes appliqués (IIASA), à Laxenbourg/Autriche, proposent un cadre de modélisation stochastique qui donne des informations permettant de faire en sorte que l’approvisionnement local en nourriture soit plus fiable. Cette étude montre comment ce type de modélisation peut aider différentes régions du monde confrontées à des phénomènes météorologiques extrêmes à atteindre l’objectif « faim zéro ». Elle analyse la production alimentaire face à l’incertitude des rendements agricoles due à la variabilité naturelle des conditions météorologiques et elle explore différentes stratégies permettant d’accroître cette fiabilité à moindre coût en partageant les risques dans le temps et dans l’espace.  

« L’allongement des périodes de sécheresse combiné à la croissance démographique exerce une pression sur les communautés agricoles. Les gouvernements ont un rôle primordial à jouer en créant des mécanismes financièrement durables visant à aider leurs citoyens et à empêcher les agriculteurs de revenir à des stratégies négatives d’adaptation, » explique Matthias Wildemeersch, chercheur participant au programme Advancing Systems Analysis de l’IIASA et coauteur de l’étude. « Notre modèle met l’accent sur la dimension « risque » de l’approvisionnement local en nourriture et clarifie le compromis entre coûts de production agricole et fiabilité de la production alimentaire. En tenant compte de ce compromis, les responsables des orientations politiques peuvent prendre des décisions plus éclairées quant à savoir quel risque d’insécurité alimentaire est acceptable et quels sont les coûts d’atténuation qui y sont associés et, en fin de compte, ils peuvent renforcer la résilience du système alimentaire. »

Matthias Wildemeersch et ses collègues ont constaté que le partage du risque dans le cadre d’une coopération régionale peut améliorer la fiabilité de la production alimentaire ainsi que la capacité de garantir la stabilité des moyens d’existence des agriculteurs. Leurs conclusions montrent comment, dans le cadre d’une coopération interrégionale, il est pratiquement possible d’éliminer les pénuries alimentaires et ce, de la façon la moins coûteuse.

« Dans l’analyse, nous exploitons diverses bases de données sur les sécheresses, les rendements agricoles, les prix au départ de l’exploitation, les coûts de production agricole et les projections démographiques pour indiquer comment il est possible d’atténuer l’insécurité alimentaire et d’accroître les moyens d’existence. Nous tenons compte de l’incertitude et du risque dans les prises de décisions, ce qui permet de prévoir les phénomènes extrêmes et d’améliorer le niveau de préparation aux mauvaises conditions météorologiques dans la région, » déclare Debbora Leip, chercheuse doctorante au PIK (Institut de recherche de Potsdam sur les effets du changement climatique), Potsdam/Allemagne, et coautrice de l’étude.  

« Cette étude se situe à la croisée du climat, de l’alimentation et de la protection sociale, et elle propose des solutions qui améliorent la résilience des agriculteurs locaux ainsi que la sécurité alimentaire dans la région. Nos conclusions montrent ce qui arrive lorsqu’on ne tient pas compte des incertitudes dans la conception des politiques agricoles. Pour protéger la région contre les risques excessifs, la fiabilité de la politique doit être une préoccupation majeure des décideurs, » fait remarquer Elena Rovenskaya, directrice du programme Advancing Systems Analysis de l’IIASA et coautrice de l’étude.

(IIASA/wi)

 

Référence
Leip, D., Rovenskaya E., Wildemeersch, M. (2024). Risk-Adjusted Decision Making Can Help Protect Food Supply and Farmer Livelihoods in West Africa Communications Earth & Environment  DOI: 10.1038/a43247-024-01242-9

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