L'agroécologie s'appuie sur des caractéristiques de gestion clés qui renforcent la résilience face au climat (voir figure).
Pour commencer, l’agroécologie repose sur des principes écologiques mettant l'accent sur des niveaux élevés de biodiversité, sur la diversité et l'hétérogénéité globales (en intégrant différentes races, variétés et espèces dans la production agricole) et sur des sols sains. L’agroécologie prend également en compte les aspects sociaux, en particulier la co-création et le partage des connaissances et la promotion des connaissances locales et traditionnelles.
Les aspects économiques sont également considérés, par exemple par la diversification des activités économiques (diversification des variétés et des espèces cultivées/élevées dans l'exploitation, systèmes intégrés), qui permet d’atténuer et de diversifier le risque de pertes de rendement d'une seule culture. L'atténuation présente également des avantages connexes, principalement liés à l'augmentation du carbone organique du sol (piégeage du carbone) et à la réduction de l'utilisation d'engrais synthétiques grâce à une amélioration de la fertilité des sols.
Les aspects institutionnels, tels que la co-création et la diffusion des connaissances par le biais de services de conseil et les approches d'agriculteur à agriculteur, jouent un rôle essentiel pour soutenir le développement, l'amélioration et l'adoption de l'agroécologie.
Dans une nouvelle publication scientifique sur l'agroécologie et le changement climatique, des preuves suggèrent que l'agroécologie peut non seulement favoriser l'adaptation au changement climatique et accroître la résilience, mais aussi contribuer à une voie à faibles émissions (voir encadré). Les résultats de cette étude soutiennent l'affirmation selon laquelle l'agroécologie devrait être reconnue comme une approche puissante pour transformer les systèmes de production agricole pour assurer un avenir plus durable et plus résistant face au climat.
L'agroécologie gagne du terrain sur la scène politique internationale, en particulier dans le cadre de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC) et de son travail conjoint sur l'agriculture en Koronivie (KJWA). De plus, un nombre croissant de pays et de parties prenantes de différents horizons considèrent l'agroécologie et les approches connexes comme un moyen prometteur d'atteindre les objectifs d'adaptation et d'atténuation et de parvenir à un changement transformationnel efficace dans les secteurs agricoles. En effet, déjà dix pour cent des 136 contributions nationales déterminées (CDN) analysées font référence à l'agroécologie comme une approche prometteuse pour faire face au changement climatique.
Des approches agroécologiques isolées (parmi les 10 principes agroécologiques fondamentaux selon la FAO) sont également mentionnées dans les CDN, tels que l'"efficacité", le "recyclage", la "diversité" et la "cocréation de connaissances". Elles sont souvent associées à des conceptions alternatives des systèmes de production telles que l'agriculture de conservation, l'agriculture intelligente face au climat, etc.
Une analyse comparative a été menée pour mieux comprendre les performances de l'agroécologie en matière de résilience écologique et socio-économique, reposant sur les 13 indicateurs de résilience des agroécosystèmes de Cabell et Oelofse (2012) et mobilisant l'outil FAO SHARP (Self-evaluation and Holistic Assessment of climate Resilience of farmers and Pastoralists).
Les résultats globaux montrent que les agriculteurs agroécologiques ont des niveaux de résilience nettement plus élevés que le groupe de contrôle (non agroécologique). Dans les deux pays et malgré des contextes très différents, l'hétérogénéité spatiale et temporelle ainsi que l'intégration et le partage des connaissances traditionnelles sont des facteurs qui renforcent la résilience de ces systèmes.
Les études de cas du Kenya et du Sénégal montrent que dans ces deux pays, malgré des cadres politiques différents, il existe un potentiel considérable pour que l'agroécologie soit reconnue comme une approche de production résiliente et durable. Toutefois, il est difficile de traduire la nature interdisciplinaire et systémique de l'agroécologie en politiques, lois et stratégies. Les deux études de cas soulignent l'importance des activités de formation et de sensibilisation pour assurer une compréhension commune de l'agroécologie et faire en sorte qu'elle soit adoptée par des cadres institutionnels appropriés.
Sur la base de cette étude, des recommandations sont formulées, s'adressant aux donateurs, aux décideurs et aux chercheurs :
Une profonde transformation holistique et systémique est nécessaire pour faire face au changement climatique ainsi que pour réaliser l'Agenda 2030 et atteindre les quatre dimensions de la sécurité alimentaire (disponibilité, accès, utilisation et stabilité). Ces défis devront être relevés compte tenu de la croissance de la population mondiale, qui exerce une pression accrue sur les ressources naturelles, avec des répercussions sur les terres, l'eau et la biodiversité.
L'étude en un coup d'œil
Le rapport Le potentiel de l'agroécologie pour renforcer la résilience des moyens de subsistance et des systèmes alimentaires face au changement climatique a été éveloppée par une riche collaboration d’acteurs : l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), des instituts de recherche (FIBL, Bioversity, ISRA) et des organisations de la société civile (la Fondation Biovision pour le développement écologique, Enda Pronat, ICE) Elle elle aborde trois dimensions différentes :
1. une analyse de l'arène politique internationale, en particulier celle de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC) sur les contributions déterminées au niveau national (CDN) et de l’Action Conjointe de Koronivia sur l’Agriculture (KJWA)
2. une méta-analyse des études scientifiques examinées par les pairs sur l'agroécologie et le changement climatique
3. deux études de cas nationales au Kenya et au Sénégal qui évaluent à la fois le potentiel politique de l'agroécologie dans le contexte national et le potentiel technique de l'agroécologie pour favoriser la résilience climatique au niveau des exploitations agricoles.
Pour en savoir plus et télécharger le rapport, consultez le site de la FAO ou le site de Biovision.
Maryline Darmaun is a PhD Student at the French National Research Institute for Sustainable Development (IRD) and Montpellier Supagro, headquartered in Montpellier/France (previously at FAO in Rome/Italy).
Fabio Leippert is Programme Manager Policy and Advocacy at Biovision Foundation for Ecological Development in Zurich, Switzerland.
Martial Bernoux is Senior Natural Resource Officer and Molefi Mpheshea is Natural Resource Officer at FAO in Rome/Italy.
Adrian Müller is a Senior Researcher at the Research Institute of Organic Agriculture FiBL in Frick, Switzerland.
Contact: agroecology@biovision.ch
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