- Lisez cet article en version anglaise
- Share this article
- Abonnez-vous à notre newsletter
La société civile a une vision claire pour la « Conférence sur les stratégies de lutte contre la faim »
L’édition de cette année de la PaH a célébré le 20e anniversaire de l’adoption des Directives volontaires des Nations à l'appui de la concrétisation progressive du droit à une alimentation adéquate. Avec le soutien de l'Institut allemand des droits de l'homme et de la Fondation Heinrich Böll, des OSC internationales, dont bon nombre sont originaires du Sud global et travaillent sur le droit à l'alimentation, ont saisi cette occasion pour organiser une pré-conférence. Cette rencontre a permis d'échanger et d'élaborer des stratégies autour des messages clés pour promouvoir le droit à l'alimentation à l’avenir.
Les OSC considèrent les directives volontaires comme un fondement prometteur pour renforcer le droit à l'alimentation. Depuis leur adoption, le Comité des Nations unies sur la sécurité alimentaire mondiale (CSA) les a placées au centre de ses préoccupations et elles ont constitué la base du cadre normatif avancé actuel sur le droit à l'alimentation, incluant les Directives volontaires sur les régimes fonciers (VGGT) ou la Déclaration des Nations unies sur les droits des paysans (UNDROP).
La persistance de la crise alimentaire mondiale, qui touche 2,4 milliards de personnes en situation d'insécurité alimentaire, et les inégalités structurelles sous-jacentes, comme la concentration croissante du contrôle des terres, de l'eau et des semences, révèlent l’urgence d’adopter une approche fondée sur les droits. Ainsi, les OSC estiment que la participation sociale est essentielle pour assurer le succès futur du droit à l'alimentation.
La participation sociale doit être le principe fondamental
Beaucoup de ceux qui souffrent le plus de la faim sont en première ligne de nos systèmes alimentaires : les peuples autochtones, les paysans et les petits exploitants agricoles, les éleveurs, les femmes, les travailleurs sans terre et les pêcheurs. Ils possèdent une compréhension approfondie des problèmes locaux et de leurs solutions. Par conséquent, leur inclusion dans les processus de prise de décision doit être la pierre angulaire de l'agenda futur pour le droit à l'alimentation. Pour garantir le succès, les organes participatifs, tels que les conseils de l'alimentation, doivent avoir un mandat clair, un pouvoir de décision et des budgets gouvernementaux.
L'expérience du Brésil
Contrairement à l'Allemagne, tous les acteurs mentionnés ci-dessus font partie du CONSEA, le conseil national brésilien pour la politique alimentaire, qui est l'organe le plus inclusif au monde en matière de prise de décision politique au niveau national. Pour minimiser les conflits d'intérêts, le CONSEA exclut le secteur privé. Cette approche basée sur les droits, plaçant les détenteurs de droits et de devoirs au centre, devrait être adoptée non seulement par le gouvernement allemand et tous les États membres des Nations unies, mais aussi par l'ensemble du système multilatéral. En effet, la mainmise des entreprises et leur influence croissante, ainsi que les fondations philanthropiques issues de ces entreprises pour économiser des impôts et dissimuler l'influence politique de leurs propriétaires ultra-riches, menacent la justice et l'égalité dans les systèmes alimentaires.
Le ministère fédéral allemand de l'alimentation et de l'agriculture (BMEL) a fait un premier pas dans la bonne direction en mettant en avant le CONSEA lors de la conférence sur les stratégies de lutte contre la faim. Le gouvernement allemand doit maintenant tirer les leçons de cette expérience et les appliquer. Parallèlement, le gouvernement allemand, avec des alliés tels que le Brésil et l'UE, doit continuer à soutenir et à renforcer le CSA, qui est la plateforme la plus inclusive au sein des Nations unies.
L'agroécologie et la souveraineté alimentaire sont la voie à suivre
Les principes de l'agroécologie et de la souveraineté alimentaire ont été reconnus comme étant d’autres piliers essentiels de l'agenda futur. Contrairement à l'idée reçue selon laquelle l'agroécologie se limite à des méthodes de culture biologique, elle représente une approche holistique centrée sur l'humain, combinant une production alimentaire biologique innovante avec une organisation sociopolitique des systèmes alimentaires. En tant qu’éléments essentiels du cadre normatif avancé promouvant le droit à l'alimentation, l'agroécologie et la souveraineté alimentaire sont inscrites dans l’UNDROP. Elles soutiennent l'agrobiodiversité et garantissent l'accès et le contrôle des terres, de l'eau et des semences à ceux qui produisent les aliments destinés aux communautés locales et régionales.
C'est pourquoi les OSC encouragent l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) à adopter l'agroécologie comme une approche essentielle pour garantir le droit à l'alimentation. Pour renforcer cette démarche, il est nécessaire d’augmenter les investissements publics destinés à soutenir les divisions concernées de la FAO, telles que l'unité en charge du droit à l'alimentation. De plus, la FAO devrait promouvoir la mise en place de réglementations sur le marché pour garantir la souveraineté alimentaire des populations et favoriser un commerce mondial équitable.
Pour garantir le respect du droit à l'alimentation, il est essentiel d’établir des mécanismes de responsabilité solides et une cohérence politique
Il est primordial de mettre fin à l'impunité des personnes responsables de violer ce droit. Les OSC participant à la conférence sur les stratégies de lutte contre la faim demandent que les lois et les règlements intègrent explicitement le droit à l'alimentation, ce qui devient un élément clé pour les mouvements sociaux, permettant de tenir les auteurs de ces violations pour responsables. Lors de la conférence, il a été souligné que la possibilité de faire valoir le droit à l'alimentation devant la justice est un aspect crucial de l’agenda futur pour ce droit.
Enfin, le principe selon lequel l'État a la triple obligation de respecter, protéger et réaliser le droit à l'alimentation doit guider les décisions politiques dans tous les domaines, qu'il s'agisse de l'alimentation, de l'agriculture, du droit humanitaire, de la santé, de la sécurité sociale, du logement, de l'éducation, du commerce ou d'autres secteurs. Ce n'est qu'ainsi que le droit fondamental à une alimentation adéquate peut être pleinement garanti.
Auteur : Jan Dreier, FIAN Allemagne, contact: j.dreier@fian.de
Ajoutez un commentaire
Soyez le premier à faire un commentaire