Un accroissement des apports de carbone dans le sol pourrait ralentir le changement climatique et, parallèlement, augmenter les rendements agricoles.
Photo: ©Frank Luerweg / Université de Bonn

Utiliser le potentiel du sol pour atténuer le changement climatique

Ces dernières années, on n’a pas accordé suffisamment d’attention au potentiel qu’a le sol de stocker le dioxyde de carbone. C’est ce que constatent des chercheurs qui formulent également une stratégie de lutte contre l’effet de serre. Cette stratégie se fixe deux objectifs simultanés : la protection du climat et la sécurité alimentaire.

En exploitant la capacité qu’a le sol de fixer de grandes quantités de carbone, on pourrait réduire d’un tiers l’augmentation de la présence du dioxyde d’azote (gaz à effet de serre) dans l’atmosphère. Parallèlement, on pourrait considérablement améliorer les rendements agricoles dans de nombreuses régions.

Une équipe internationale de chercheurs préconise l’exploitation effective de ce potentiel, comme l’a rapporté l’université de Bonn sur son site Internet en novembre 2020. Dans une récente publication, les chercheurs ont présenté une stratégie visant à atteindre ces objectifs. Les résultats de leur étude sont publiés dans la revue Nature Communications.

Le sol est déjà un gigantesque réservoir de carbone 


C’est lors du Sommet de Paris sur le changement climatique, organisé en 2015, qu’est née ce qu’on a appelé l’initiative « 4 pour 1 000 ». Elle tire son nom d’un lien auquel la recherche et la politique climatiques n’accorde pas suffisamment d’attention depuis longtemps : tous les ans, la quantité de carbone dans l’atmosphère augmente de plus de quatre milliards de tonnes et c’est le CO2, un gaz à effet de serre produit par l’homme, qui en est responsable. 

Si, à l’échelle de la planète, ces quatre milliards de tonnes de CO2 étaient fixés dans le sol (ce qui stopperait complètement l’effet de serre), la quantité de carbone contenue dans le sol n’augmenterait que de 0,4 pour cent annuellement (c’est-à-dire de 4 pour 1 000). Autrement dit, le sol étant déjà un gigantesque réservoir de carbone, pourquoi ne pas tout simplement y ajouter l’excédent de CO2 dont la quantité est quasi négligeable ? 

Aujourd’hui, les spécialistes sont persuadés que cette stratégie pourrait considérablement ralentir le changement climatique. « Un apport supplémentaire de 0,4 pour cent de carbone est un peu trop optimiste, » explique le professeur Wulf Amelung, qui dirige la division Science des sols à l’université de Bonn. « Mais il est probablement possible d’atteindre un tiers de ce pourcentage. » Néanmoins, les choses ont peu changé depuis 2015.

Des mesures simples permettraient d’augmenter la quantité de carbone stockée dans le sol 


Un certain nombre de mesures simples permet d’augmenter la quantité de carbone dans le sol, par exemple le paillage (qui consiste à recouvrir le sol de résidus agricoles) ou l’addition de charbon d’origine végétale. Toutefois, la méthode la plus importante consiste à stimuler la croissance des plantes (et par conséquent les rendements agricoles) : en chaulant les sols acides, en les fertilisant selon les besoins et en pratiquant l’irrigation intelligente. Les chercheurs soulignent que plus on cultive le sol, plus les racines se développent et plus leurs vastes réseaux de matière organique stockent de carbone. De plus, cette matière organique contient des nutriments essentiels pour la croissance des végétaux et augmente ainsi les rendements agricoles. Par conséquent, la stratégie a deux importants objectifs : la protection du climat et la sécurité alimentaire.

Toutefois, parce que la qualité et les caractéristiques des sols sont très différentes et parce que les technologies de gestion disponibles sont très dissemblables à l’échelle mondiale, des mesures adaptées aux conditions locales sont nécessaires. Par ailleurs, de nombreuses mesures de séquestration du carbone sont particulièrement efficaces lorsque les sols sont partiellement dégradés par une longue surexploitation et ont en partie épuisé leur teneur en carbone. Selon les experts, et d’un point de vue coût-bénéfice, il est plus logique de commencer dans de telles zones, notamment parce que c’est là que les augmentations de rendement sont les plus fortes.

Malheureusement, les connaissances concernant l’état des sols sont très parcellaires. Les chercheurs recommandent par conséquent de créer des bases de données mondiales à très petite échelle sur l’état des sols, ainsi qu’un système de modélisation (également à petite échelle) des gains de rendement possibles et de l’utilisation nécessaire d’engrais. Il faut en outre s’assurer de ne pas simplement redistribuer les apports en carbone : par exemple, veiller à ne pas déplacer de la matière organique d’une exploitation à une autre, à grands frais, et constater ensuite qu’elle fait défaut dans son lieu d’origine.

(Université de Bonn/ile)

Pour en savoir plus, aller sur le site Internet de l’université de Bonn (en anglais)

Publication : W. Amelung, D. Bossio, W. de Vries, I. Kögel-Knabner, J. Lehmann, R. Amundson, R. Bol, C. Collins, R. Lal, J. Leifeld, B. Minasny, G. Pan, K. Paustian, C. Rumpel, J. Sanderman, J.W. van Groenigen, S. Mooney, B. van Wesemael, M. Wander et A. Chabbi : Towards a global-scale soil climate mitigation strategy ; Nature Communications, DOI: 10.1038/s41467-020-18887-7

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