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Des indicateurs pour mesurer la dégradation de la faune sauvage dans les forêts tropicales
Les mammifères de taille moyenne à grande jouent un rôle crucial dans les écosystèmes tropicaux, en tant qu'herbivores, disperseurs de graines et prédateurs. Cependant, ces espèces sont également des cibles privilégiées pour les chasseurs, ce qui entraîne des changements considérables au sein des communautés de faune et de flore de ces écosystèmes.
Une équipe internationale de chercheurs a révélé que la surchasse provoque des changements prévisibles : les animaux de grande taille et à reproduction lente disparaissent les premiers, tandis que les espèces plus petites et plus résistantes, comme les rongeurs, deviennent plus dominantes.
Pour comprendre ces changements, les chercheurs ont mené un travail de longue haleine sur le terrain au Gabon, en utilisant un dispositif de suivi par piège photographique et des enregistrements des prises des chasseurs. Ils ont collaboré avec 314 chasseurs dans dix communautés villageoises, enregistrant les données de près de 13 000 sorties de chasse.
En comparant la composition de la faune dans les zones chassées avec celle des sites de référence protégés, tels que le parc national de l'Ivindo, l'équipe a mis en évidence des indicateurs fiables de l’état d’altération de la faune.
Deux indicateurs clés pour la conservation
L'étude identifie deux principaux indices qui constituent des outils simples mais puissants pour le suivi de la dégradation de la faune :
- Le ratio rongeurs-ongulés, qui augmente de manière significative dans les zones fortement chassées, reflétant une présence plus importante d'espèces plus petites et plus résistantes.
- La masse corporelle moyenne des animaux prélevés, qui diminue à mesure que la pression de chasse s'intensifie, et indique un déclin des espèces de plus grande taille.
Ces indicateurs sont non seulement faciles à calculer, mais aussi pratiques à mettre en œuvre dans le cadre de programmes de gestion de la chasse menés par les communautés elles-mêmes. Ils fournissent des informations précieuses pour suivre et gérer l’état d’altération de leurs écosystèmes.
Impliquer les chasseurs dans la surveillance et la gestion de la faune sauvage
Les résultats de l’étude soulignent l'importance d'impliquer les communautés locales dans la surveillance et la gestion de la faune. Les chasseurs, grâce à leur connaissance approfondie de la forêt, peuvent jouer un rôle essentiel dans la collecte de données et la mise en place progressive de pratiques de chasse durables. Cette approche communautaire s'aligne sur les objectifs de conservation mondiaux, tels que l'objectif « 30×30 » du Cadre mondial pour la biodiversité, qui vise à protéger 30 pour cent des terres et des eaux de la planète d'ici à 2030.
Le premier auteur de l'étude, Davy Fonteyn, qui a effectué ce travail au Cirad, et qui appartient actuellement à l'Université de Liège (Gembloux), souligne :
« En tirant parti de l'expertise des communautés locales et en utilisant ces indicateurs simples, nous pouvons faire des progrès significatifs dans la conservation de la faune et dans le maintien de l'équilibre écologique des forêts tropicales. »
Le chercheur qui a dirigé l'étude, Daniel Cornélis du Cirad, poursuit :
« Cet article présente une nouvelle approche, dérivée des données de pièges photographiques, pour évaluer l'altération des assemblages de faune. En intégrant les données des pièges photographiques et des prélèvements de chasse, nous établissons que les indicateurs de chasse les plus fiables pour évaluer l'altération des assemblages de faune sont aussi les plus faciles à calculer ! Ces résultats offrent un moyen prometteur de simplifier la surveillance de la chasse, facilitant ainsi son adoption par les communautés locales. »
Les chercheurs préconisent d'étendre cette approche à d'autres régions tropicales, en adaptant les indicateurs à différents contextes écologiques. Ils appellent également à l'intégration de ces méthodes dans des stratégies de conservation plus larges, y compris l'établissement de zones d'utilisation communautaire et la préservation ou la restauration de la connectivité écologique à grande échelle.
Le Programme de gestion durable de la faune sauvage (SWM)
Le programme SWM est une initiative internationale majeure qui vise à améliorer la conservation et l'utilisation durables de la faune dans les écosystèmes de forêts, de savanes et de zones humides. Il est financé par l'Union européenne et cofinancé par le Fonds français pour l'environnement mondial (FFEM) et l'Agence française de développement (AFD). Les projets sont pilotés et testés avec les gouvernements et les communautés dans 16 pays participants. L'initiative est coordonnée par un consortium de quatre partenaires, à savoir l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), le Centre pour la recherche forestière internationale et l'agroforesterie mondiale (CIFOR-ICRAF), le Centre de recherche agronomique pour le développement international (CIRAD) et la Wildlife Conservation Society (WCS).
(CIRAD/wi)
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