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Amélioration des récoltes grâce au clonage naturel
Dans l’agriculture d’aujourd’hui, les plantes hybrides sont primordiales pour assurer la production suffisante d’aliments pour l’homme et l’animal, de combustibles et de fibres. Ces croisements entre deux variétés différentes sont jugés particulièrement rustiques et bien plus productifs que les souches mères. Les plantes hybrides font mieux que de doubler les récoltes de certains types de céréales telles que le maïs. Toutefois, les propriétés positives de ces plantes sont perdues dès la prochaine génération, ce qui explique qu’il faut produire des semences hybrides tous les ans. Ces croisements sont coûteux ; ils prennent du temps et les agriculteurs doivent s’en remettre à de nouvelles semences tous les ans.
Dans les années 1930, deux chercheurs russes ont proposé de simplifier ce processus complexe : si les croisements de la première génération appelés hybrides F-1 pouvaient se reproduire de manière asexuée, ils conserveraient leur surcroît d’efficacité. Certaines espèces végétales se reproduisent naturellement par clonage de leurs semences, phénomène qu’on appelle apomixie. Toutefois, la théorie selon laquelle l’apomixie pouvait préserver les propriétés des plantes hybrides n’avait jamais été testée dans un cadre expérimental – du moins jusqu’à maintenant : en effet, le professeur Ueli Grossniklaus et son équipe du département de biologie végétale et microbienne de l’université de Zurich/Suisse ont prouvé le bien-fondé de cette théorie.
« À partir de plantes hybrides se reproduisant par apomixie, nous avons démontré que les « descendants » présentent les propriétés biologiques souhaitées, » explique le premier auteur, le Dr Christian Sailer. « Nous avons réussi à fixer les propriétés positives des hybrides. » Ces plantes atteignent la même taille et offrent le même rendement pendant au moins deux générations de plus. Ce résultat contraste vivement avec ceux obtenus avec des plantes de la génération suivante d’hybrides F1 traditionnels utilisés dans l’agriculture et dont les propriétés diffèrent considérablement.
Pour ses expériences, l’équipe de chercheurs a créé onze hybrides à partir de piloselle apomictique naturelle (Hieracium pilosella) et les a reproduits pendant deux générations par clonage naturel des semences. 20 propriétés différentes ont été mesurées et testées pour voir si elles changeaient d’une génération à l’autre. Par ailleurs, les deux générations du même clone ont été cultivées en même temps en serre pour les exposer aux mêmes conditions environnementales et exclure divers facteurs tels que la température, l’eau et la lumière.
Des semences plus abordables et plus rustiques pour les petites exploitations agricoles
« Si cette méthode de reproduction pouvait être utilisée dans l’agriculture, les coûts de production des semences hybrides F1 s’en trouveraient considérablement diminués, » explique le professeur Grossniklaus. « Les producteurs de semences ne seraient pas les seuls à y gagner ; les agriculteurs en exploitation de subsistance des pays en développement y trouveraient également leur compte. » Actuellement, ces petits exploitants agricoles cultivent généralement des plantes autochtones moins productives pour leur usage personnel. La reproduction apomictique leur permettrait d’accéder à des souches hybrides plus productives et plus rustiques à prix abordable. Et, en plus, ils pourraient utiliser les semences de la dernière récolte pour les semis de l’année suivante, sans pour autant affecter les rendements. Le professeur Grossniklaus précise toutefois que l’utilisation effective de cette technologie en agriculture doit encore faire l’objet d’essais plus poussés.
(UZH/wi)
Publication originale
Christian Sailer, Bernhard Schmid, Ueli Grossniklaus : Apomixis allows the transgenerational fixation of phenotypes in hybrid plants (l’apomixie permet la fixation transgénérationnelle de phénotypes dans des plantes hybrides). Current Biology, 28 janvier 2016. Doi: 10.1016/j.cub.2015.12.045
Résumée (en anglais)
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