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Une découverte génétique pourrait améliorer la croissance de légumineuses
Les légumineuses telles que les haricots, les pois et les lentilles ont la particularité d’interagir avec les bactéries du sol pour transformer (ou « fixer ») l’azote en nutriments utilisables. Toutefois, ce processus biologique énergivore est réduit lorsque le sol est déjà riche en azote, du fait de phénomènes naturels ou de l’utilisation d’engrais artificiels.
La récente découverte du régulateur génétique qui stoppe la fixation de l’azote lorsque les quantités de nitrates dans le sol sont élevées a permis aux chercheurs de retirer le gène de légumineuses-témoins et de constater qu’elles continuaient de fixer l’azote, indépendamment de la nature du sol. L’amélioration de la capacité biologique des légumineuses à fixer l’azote pourrait favoriser leur croissance et accroître les rendements tout en réduisant la nécessité d’utiliser des engrais artificiels qui contribuent à renforcer l’empreinte environnementale de l’agriculture. Les résultats de l’étude réalisée dans le cadre du projet international Enabling Nutrient Symbioses in Agriculture (ENSA) ont été publiés dans Nature en juin dernier.
« D’un point de vue agricole, la fixation permanente de l’azote pourrait être une caractéristique bénéfique accroissant la disponibilité de l’azote, aussi bien pour les légumineuses en terre que pour les cultures à venir qui dépendent de l’azote laissé dans le sol par les légumineuses qui les précèdent, » déclare le Dr Dugald Reid, auteur principal, professeur à l’université et chef du groupe de recherche de l’institut La Trobe pour l’agriculture et l’alimentation durables (La Trobe Institute for Sustainable Agriculture and Food – LISAF) et du département des sciences animales, végétales et du sol (Department of Animal Plant and Soil Science), ainsi que chercheur dans le cadre du projet ENSA. « Cette découverte nous aide à jeter les bases de futures études offrant de nouvelles perspectives de gestion de nos systèmes agricoles avec un moindre recours aux engrais, un accroissement des revenus agricoles et une réduction de l’impact des engrais azotés sur l’environnement. » Le projet ENSA est actuellement financé par l’initiative Bill & Melinda Gates Agricultural Innovations (Gates Ag One), une organisation à but non lucratif qui investit dans la recherche agricole de pointe pour répondre aux besoins urgents et négligés des petits exploitants agricoles de l’Afrique subsaharienne et de l’Asie du Sud.
Rôle du gène régulateur FUN (Fixation Under Nitrate)
L’équipe a découvert le régulateur FUN (Fixation Under Nitrate) après avoir examiné 150 000 légumineuses individuelles dans lesquelles les gènes avaient été éliminés pour savoir comment les végétaux contrôlent le passage de la fixation de l’azote à l’absorption de l’azote du sol. On a constaté que FUN, qui est un type de gène connu comme facteur de transcription et qui contrôle les niveaux d’autres gènes, était présent dans les légumineuses, qu’il soit actif ou inactif, et indépendamment des niveaux d’azote. « Dans le cadre de l’étude, nous avons conçu un filtre génétique pour des milliers de végétaux en serres afin d’identifier les gènes qui connectent les déclencheurs environnementaux avec les signaux biologiques, » déclare le Dr Jieshun Lin, coauteur du document et chercheur dans le cadre du projet ENSA. « En augmentant les niveaux d’azote disponibles pour la légumineuse-témoin, nous avons pu identifier celles dont la régulation de fixation de l’azote était altérée et découvrir le mutant FUN. » L’équipe a ensuite utilisé une combinaison de moyens biochimiques et microscopiques et d’études d’expression des gènes pour découvrir que, lorsqu’il est inactif, FUN forme de longs filaments de protéine.
Ce résultat a entraîné une découverte secondaire, à savoir que les niveaux de zinc jouent un rôle dans le passage de FUN en mode actif et stoppent la fixation de l’azote. « Nous avons constaté que la modification de la teneur du sol en azote altère les niveaux de zinc dans la plante. On ne connaissait à ce jour aucun lien entre le zinc et la régulation de la fixation de l’azote, mais notre étude a montré qu’un changement des niveaux de zinc active FUN qui contrôle alors un grand nombre de gènes qui stoppent la fixation de l’azote, » déclare le Dr Kasper Andersen, co-auteur de l’étude et chercheur dans le cadre du projet ENSA. « En supprimant FUN, on crée donc une condition dans laquelle la fixation de l’azote n’est plus stoppée par la plante. » L’étude a été dirigée par des chercheurs de l’université La Trobe, Australie, et de l’université d’Aarhus, Danemark, en collaboration avec l’installation européenne de rayonnement synchrotron (European Synchrotron Radiation Facility – ESRF), avec le centre de biotechnologie et de génomique des plantes (Centro de Biotecnología y Genómica de Plantas), Espagne, et avec l’université polytechnique de Madrid (Universidad Politécnica de Madrid – UPM). Les chercheurs voudraient maintenant à savoir comment se comportent des légumineuses communes telles que le soja et le niébé lorsque FUN devient inactif.
(La Trobe University/wi)
Référence :
Dugald Reid et al: Zinc mediates control of nitrogen fixation via transcription factor filamentation; Nature, 26 juin, 2024, 631, pages164–169 (2024); DOI: 10.1038/s41586-024-07607-6
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